Histoire et mémoires et de la guerre d'Algérie
Consigne : Après avoir présenté votre acteur et son positionnement durant la guerre d’Algérie, vous mettrez en évidence les mémoires qu’il conserve de ce conflit avant de montrer le degré de prise en compte de ces mémoires (oubli, reconnaissance, instrumentalisation) en France et en Algérie jusqu’à nos jours.
Qu'est-ce qu'un Militaire de carrière ?(3/9)
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Photographie du Mémorial de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie (1952-1962), quai Branly à Paris, inauguré le 5 décembre 2002 par le président de la République Jacques Chirac
1. Noms et prénoms des 23 000 soldats et harkis morts pour la France en Afrique du Nord défilant en continu.
2. Messages rappelant la période de la guerre d'Algérie et le souvenir des disparus après le cessez-le-feu.
3. Borne interactive située au pied de la colonne qui permet aux visiteurs de voir s'afficher le nom d'un soldat.
4. "A la mémoire des combattants morts pour la France lors de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie, et à celle de tous les membres des forces supplétives, tués après le cessez-le-feu en Algérie, dont beaucoup n'ont pas été identifiés".
 
La reconnaissance de l’État français

TITRE 1er : modification du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (...)

Article L 1er bis : La République française reconnaît, dans des conditions de stricte égalité avec les combattants des conflits antérieurs, les services rendus par les personnes qui ont participé sous son autorité à la guerre d'Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962.
Elle leur accorde vocation à la qualité de combattant et au bénéfice des dispositions du présent code.
Article 2 : (...) Ces dispositions sont également applicables aux membres des forces supplétives françaises ayant participé à la guerre d'Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962.
Article 3 : Dans le premier alinéa de l'article L. 253 bis du même code, (...) les mots "des opérations effectuées en Afrique du Nord" sont remplacés par les mots : "de la guerre d'Algérie ou des combats en Tunisie et au Maroc."

Loi n° 99-882 du 18 octobre 1999.
La Guerre sans nom à la télévision

C'est le film La Guerre sans nom de Bertrand Tavernier et Patrick Rotman, sorti en salles en février 1992 et diffusé sur Canal Plus en mars 1993, qui fait date. Dans ce film, quatre heures durant, des soldats français racontent leur guerre d'Algérie. (...) Les appelés racontent l'ordinaire de la guerre, avec les gardes, les marches, les embuscades, les accrochages ou les ratissages et, par-dessus tout, la peur permanente. Ils évoquent la grande fraternité des hommes des casernes, la vie du trouffion sous la tente ou dans le djebel. (...) Ils expliquent le travail quotidien, celui de l'électricien qui répare le barrage à la frontière tunisienne, la construction d'écoles ou de maisons, les camps de regroupement où l'on parque les populations musulmanes, les soins aux Algériens dispensés par le médecin militaire.
Et puis jaillissent quelques phrases, à la fois pudiques et terribles, sur les sévices, les viols, les vols, les brutalités, les meurtres, l'incendie des "mechtas" (hameaux), les représailles contre les civils, parce que l'ordinaire de la guerre d'Algérie c'était aussi cela. De retour au pays, ces hommes sont malades, anxieux, instables, brutalement vieillis par 27 mois de guerre. Leurs nuits sont peuplées de cauchemars. Certes, pour la plupart d'entre eux la vie finit par reprendre le dessus. Il reste le souvenir ému d'une aventure de jeunesse et celui, amer, d'avoir participé à une guerre inutile. (...) La télévision s'avère être un outil très puissant pour réveiller la mémoire et accompagner le travail de deuil collectif.

Patrick Eveno, "Paroles de soldats en guerre d'Algérie", Le Temps des médias, vol. 4, n° 1 , 2005.
Caricature de Plantu parue dans Le Monde, 3 mai 2001
Dans ses Mémoires parus en 2001, le général Aussaresses justifie le recours à la torture par l'armée française durant la guerre.
 
Affiche du film de René Vautier, Avoir 20 ans dans les Aurès, 1972.
Premier film français à montrer les exactions de l'armée française durant la guerre d'Algérie, il est récompensé au festival de Cannes l'année de sa sortie. Son réalisateur a dû entamer une grève de la faim avant d'obtenir un visa d'exploitation pour son film.
 
La torture en Algérie

Les Officiers de renseignement savent que la guerre ne pourra être gagnée sans renseignements et que c'est principalement à eux de les fournir. Leur priorité est, dès lors, claire. La torture est un des instruments à disposition de ces hommes pour accomplir leur tâche : à eux de décider s'ils l'emploient ou non. Les directives officielles les y incitent parfois, le leur interdisent d'autres fois mais toujours en leur enjoignant, par ailleurs, d'obtenir des renseignements, que leur seul guide reste leur conscience, professionnelle ou personnelle. Or la torture peut paraître efficace. En 1957, elle est utilisée sur une large échelle à Alger par les troupes du général Massu, à qui les autorités politiques ont remis les pleins pouvoirs dans la ville. Des centres de torture sont installés et les parachutistes ne lésinent pas sur les moyens pour faire parler et faire peur. Outre les personnes arrêtées, gardées au secret parfois des semaines voire des mois, et torturées, d'autres disparaissent à jamais après avoir été emmenées par ces militaires.

Raphaëlle Branche, "La torture pendant la guerre d'Algérie", dans Mohammed Harbi et Benjamin Stora (dir.), La guerre d'Algérie, 1954-2004. La fin de l'amnésie, Paris, 2004.
Témoignages de militaires et travaux d'historiens

Comme on le sait notamment grâce à plusieurs livres de Pierre Vidal-Naquet (historien) et Yves Courrière (journaliste qui a couvert la guerre d'Algérie et en a écrit la première grande histoire en 1968), la torture par ingestion forcée d'eau et par décharges électriques, faisait partie des moyens autorisés, voire recommandés. Le général Massu (militaire qui reçut des pouvoirs de police lors de la bataille d'Alger en 1957 afin de briser le FLN) s'en est défendu dans son livre, préférant parler de '"question par force", et excluant tout sadisme. (...) Le général Massu a également présenté dans son livre un grand nombre de ses subordonnés, mais il n'a pas dit que son adjoint, le lieutenant-colonel Roger Trinquier, avait dans ses livres publiés après son départ de l'armée, justifié comme dernier recours l'usage de la torture. (...) Et surtout le général n'a presque rien dit d'un certain commandant "O" - Aussaresses - qu'Yves Courrière avait présenté dans son livre Le Temps des Léopards par en 1969 comme le chef d'une équipe secrète d'exécuteurs des basses œuvres, chargé de liquider tous les prisonniers trop importants ou trop mal traités pour pouvoir ensuite être remis à la justice.

Guy Pervillé, Histoire iconoclaste de la guerre d'Algérie et de sa mémoire, Paris, 2018.