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Armes chimiques en Syrie : "la ligne rouge" et l'échec du désarmement
Depuis le début du conflit, le régime syrien a été accusé à de nombreuses reprises d'avoir eu recours à des armes chimiques. Pourtant, un accord, conclu en 2013 sous le patronage de la Russie, prévoyait…
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Comment le 11 Septembre a-t-il aveuglé la politique étrangère américaine ?

Après les attentats de 2001, la politique étrangère est devenue la priorité numéro un du gouvernement américain. Face au terrorisme, les États-Unis ont voulu apporter une réponse globale et militaire. Quitte à se détourner de certaines réalités.

"Le 11 Septembre a tout changé. Il a changé la façon dont nous réfléchissons aux menaces pesant sur les États-Unis. Il a changé notre conscience de notre vulnérabilité. Il a changé le type de stratégie de sécurité nationale dont nous avons besoin pour garantir la sûreté et la sécurité du peuple américain."

Vice-président au moment de l’effondrement des tours jumelles le 11 septembre 2021, Dick Cheney a rapidement pris conscience des bouleversements entraînés par cette attaque historique sur le sol américain.

Pour les comprendre, il faut remonter un temps le fil de l’histoire. "Depuis la fin de la guerre froide, les dirigeants de la politique extérieure américaine étaient écartelés entre deux pulsions", explique à La Nouvelle République l’historien Pierre Melandri, auteur de plusieurs ouvrages de référence sur la politique étrangère américaine (1).

La première tient dans la conviction que leur puissance est sans égale et "que la chute de l’URSS a consacré leur modèle de démocratie de marché", rappelle l’historien.

La deuxième relève du "syndrome vietnamien" : "C’est la hantise de se faire happer dans des interventions dont la guerre du Vietnam avait illustré les dangers", détaille Pierre Mélandri, en faisant référence au coût humain et politique de cette guerre devenue impopulaire.

Point d’équilibre entre ces deux pulsions, Bill Clinton avait mené "une politique un peu hybride" en s’efforçant de "substituer des interventions exclusivement conduites par les airs à des engagements au sol potentiellement meurtriers". Comme pour la guerre du Kosovo (1998-1999).
11 Septembre : le grand bouleversement

"Ce que le 11 Septembre fait, c’est pulvériser tout cela. La peur quasi-panique que les attentats ont provoqué, tant dans l’opinion que chez les élites, a libéré l’hybris (la démesure) que la chute de l’URSS avait instillée et que le syndrôme vietnamien avait bridée", analyse Pierre Melandri.

En effet, la politique étrangère devient la priorité numéro 1 du gouvernement du 43e président des États-Unis George W. Bush. L’historien poursuit : "D’emblée, Bush qualifie ce qui était avant tout des crimes abominables d’actes de guerre et met l’accent sur une réponse globale et militaire." C’est le début de la "guerre globale" et préventive contre le terrorisme.
George W. Bush dira en juin 2002 : "Nous devons porter la bataille chez l’ennemi et faire face aux pires menaces avant qu’elles n’émergent." Sans oublier la volonté, affichée à l’époque, d’y diffuser l’économie de marché et la démocratie à l’occidentale.
L'avènement des "gendarmes du monde"

Et voilà les États-Unis transformés en une sorte de "gendarmes du monde" habilités à définir le bien et le mal à l’échelle du monde entier. Ou en tout cas à faire des idéaux de l’Amérique ceux de l’humanité toute entière. Bush dira notamment : "La liberté que nous chérissons n’est pas le cadeau de l’Amérique au monde mais le don de Dieu à l’humanité."

À peine un mois après le 11 Septembre, l’intervention en Afghanistan est donc lancée. Si elle commence par un succès rapide avec la prise de Kaboul des mains des talibans, très vite la fuite de Ben Laden, le double-jeu du Pakistan et l’emprise de seigneurs de la guerre locaux limitent son impact.
Deux ans plus tard, en 2003, l’intervention en Irak est elle aussi lancée, sans l’aval du conseil de sécurité de l’Onu et sous un motif fallacieux (les supposées armes de destruction massive).

"Les Américains ont très vite découvert, comme Dominique de Villepin leur avait rappelé (lors de son discours à l’Onu s’opposant à cette intervention) qu’après avoir gagné la guerre il faudrait gagner la paix", tient à préciser Pierre Melandri. Ainsi, dès mai 2004, l’administrateur provisoire de la coalition en Irak Paul Bremer dit à Condoleezza Rice (conseillère à la sécurité nationale de 2001 à 2005) : "Les États-Unis sont devenus la pire de toutes les choses : un occupant inefficace."
L’historien Pierre Melandri résume : "On est donc passé d’une politique réfléchissant aux limites de ses moyens à une politique ne voyant plus de limites à ce qu’elle pouvait réaliser."
Une politique aux coûts exorbitants

Pour quels résultats ? Certes, le pays n’a pas connu d’autre 11 Septembre, mais cette politique a eu un coût extraordinairement élevé. "Un coût humain : les milliers de morts américains, les dizaines de milliers de morts afghans et les centaines de milliers de morts irakiens… Et un coût financier : les milliers de milliards de dollars américains", détaille Pierre Melandri.

Sans oublier le coût idéologique et politique. L’historien précise : "Les images de la prison d’Abou Ghraib et les révélations sur la torture ont sapé l’image des États-Unis comme champions des libertés et l’unilatéralisme forcené qu’ils se sont crus en droit de pratiquer a pulvérisé le réflexe très fort de sympathie que le 11 Septembre avait créé chez leurs alliés."
Mais surtout, à l’échelle de la planète, "la guerre contre le terrorisme a détourné leur attention de ce qui était le phénomène le plus important de ces années : l’ascension de la Chine", rappelle l’historien. Car 2001 c’est aussi l’année de l’entrée de la Chine à l’OMC (Organisation mondiale du commerce).

Le 11 Septembre a tourné à une "forme d’obsession qui les a détournés de certaines réalités qui ont eu leur revanche", récapitule Pierre Melandri.
Voilà pourquoi, dès le milieu des années 2000, "George W. Bush a commencé à infléchir cette politique étrangère et pourquoi, dans la foulée de la crise financière de 2008 et de la prise de conscience toujours plus grande de l’ascension de la Chine, le président Obama l'a profondément réorientée".

Il plaide alors pour l’action diplomatique plutôt que le recours à la force armée. Il esquisse trois inflexions capitales, détaille l’historien. "Il ne cache pas son intention de mettre un terme à ces guerres, affiche sa détermination à répondre au défi de l’ascension de la Chine (c’est le pivot vers l’Asie annoncé en 2011) et rappelle qu’historiquement la politique étrangère américaine s’est toujours voulue une auxillaire de l’épanouissement de l’expérience nationale."

Ce qui fait dire à l’historien que la présidence Obama "apparaît comme le début de la fin de l’ère que le 11-Septembre avait inauguré".
La présidence Trump porte ensuite ces inflexions à leur paroxysme, avec son "America first" (l’Amérique d’abord) qui proclame sa détermination à toujours faire passer les intérêts nationaux en premier et "à faire de l’unilatéralisme l’étoile polaire de sa politique étrangère".

"Face à la montée en puissance de la Chine, il érige la compétition entre grandes puissances en nouveau paradigme de la politique étrangère américaine" et relègue ainsi la lutte contre le terrorisme au second plan.
Dès 2020, le nouveau président Joe Biden fait en quelque sorte la synthèse entre l’approche d’Obama et celle de Trump. Il adhère notamment à la nouvelle hiérarchie des menaces que Trump avait entériné. Pour justifier le retrait d’Afghanistan, il dira : "Il n’y a rien que la Chine ou la Russie ne voudraient davantage dans cette compétition que voir les États-Unis s’enliser une autre décennie en Afghanistan."

Pierre Melandri récapitule : "Le renversement des priorités, esquissé par Obama et ancré par Trump, est désormais érigé en règle d’or par Biden." La parenthèse de guerre globale contre le terrorisme est refermée. Définitivement ?
(1) Dont "Histoire des États-Unis depuis 1865" (Nathan), "La Politique extérieure des États-Unis de 1945 à nos jours" (Puf) et "Le Siècle américain, une histoire" (Perrin).

NOUVELLE REPUBLIQUE Ambre PHILOUZE-ROUSSEAU
Publié le 11/09/2021

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Les États-Unis dominent-ils toujours le monde ?
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Zelensky « prêt » à revoir Trump cette semaine après l’humiliation dans le Bureau ovale
La dernière rencontre des deux hommes à la Maison-Blanche avait été particulièrement tendue.
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Les Contre Révolutions De Donald Trump Bouleversent Déjà Le Visage Des Etats Unis
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De Trump à Biden : quel leadership américain ? - Le Dessous des cartes | ARTE
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L'unilatéralisme des Etats-Unis est contesté

Début 2003, George W. Bush manifeste l'intention d'envahir l'Irak et de renverser Saddam Hussein, dictateur irakien accusé de soutenir le terrorisme international. Un débat a lieu au Conseil de sécurité de l'ONU.

"L'autorité de notre action repose aujourd'hui sur l'unité de la communauté internationale. Une intervention militaire (...) pourrait avoir des conséquences incalculables pour la stabilité de cette région meurtrie et fragile. Elle renforcerait le sentiment d'injustice, aggraverait les tensions et risquerait d'ouvrir la voie à d'autres conflits. (...)
Il y a dix jours, le secrétaire d’État américain, Colin Powell, a évoqué les liens supposés entre al-Qaïda et le régime de Bagdad (capitale irakienne). En l'état actuel de nos recherches et informations menées en liaison avec nos alliés, rien ne nous permet d'établir de tels liens. (...) Une telle intervention ne risquerait-elle pas d'aggraver les fractures entre les sociétés, entre les cultures, entre les peuples, fractures dont se nourrit le terrorisme ?

Discours prononcé par le ministre français des Affaires étrangères Dominique de Villepin au Conseil de sécurité de l'ONU, 13 février 2003.
« La reprise du pouvoir par les talibans est une illustration cinglante du monde post-américain qui se dessine »
Tribune d' Alexandra de Hoop Scheffer, politiste Le Monde , 23 aout 2021

La stratégie de « guerre globale contre le terrorisme » mise en œuvre par les Etats-Unis et leurs alliés depuis 2001 a appauvri leur capacité de réaction aux changements géopolitiques, au profit d’autres puissances dont la Chine, estime la politiste Alexandra de Hoop Scheffer.
Il aura fallu seulement dix jours pour que les talibans reprennent le contrôle de l’Afghanistan et célèbrent à leur manière le vingtième anniversaire des attentats du 11 septembre 2001. Cette reconquête éclair et la détermination du président Biden à retirer les troupes américaines ont sidéré le monde entier. En réalité, nous assistons ici à l’aboutissement d’une décennie de désengagement américain et d’une déliquescence chronique des institutions afghanes qui ont profité aux talibans.

La reprise du pouvoir par les talibans marque un tournant géopolitique : il s’agit d’abord d’une défaite stratégique pour les Etats-Unis et leurs alliés de l’OTAN, avec des implications à long terme pour leur crédibilité et leur capacité à agir ailleurs ; c’est aussi une illustration cinglante du monde post-américain qui se dessine, au profit d’autres puissances, la Chine en premier lieu, mais aussi la Russie, la Turquie et l’Iran qui s’imposent sur le terrain et mènent la diplomatie de crise [...]
En décembre 2010, le président Obama recentre sa stratégie sur l’impératif sécuritaire de la lutte contre Al-Qaida et exclut toute entreprise de « nation building » (« construction d’Etat ») en Afghanistan, devenu un concept tabou. Il est intéressant de noter que Joe Biden, lui aussi, a évolué sur le sujet : en 2001, alors président de la commission des affaires étrangères du Sénat, il évoquait un projet de reconstruction similaire au plan Marshall, affirmant qu’une entreprise de « nation-building » en Asie centrale et du Sud était la solution à long terme au problème du terrorisme. Dix années plus tard, il insistait sur une stratégie américaine non plus de nation-building en Afghanistan mais focalisée sur la lutte contre le terrorisme, une position qu’il défend aujourd’hui avec fermeté.[...]
Pendant vingt ans, les Etats-Unis et leurs alliés ont tenté différentes stratégies pour défaire les talibans. Entre 2001 et 2005, ils se sont appuyés sur les chefs de guerre afghans, tandis que les Etats-Unis se concentraient sur l’Irak. En 2014, le soutien aux milices afghanes et aux soulèvements anti-talibans était devenu la clé. A défaut de restaurer la sécurité, l’armée américaine a distribué de l’argent pour tenter d’« acheter » la paix temporaire : le financement apporté aux seigneurs de guerre et à leurs milices en échange de leur protection des convois américains, n’a fait qu’affaiblir le gouvernement sans cesse court-circuité. Les projets de reconstruction (infrastructures, écoles) ont souvent été conçus dans un contexte de précipitation, sans s’être assurés de la capacité du gouvernement ou des autorités locales à les maintenir et les entretenir une fois les forces internationales parties.[...]

Les Etats-Unis et leurs alliés de l’OTAN sont aujourd’hui en panne de stratégie, comme en témoignent les revirements en Afghanistan, en Irak, en Libye, en Syrie et au Sahel, les balbutiements de la réflexion européenne sur ces sujets, et l’incapacité des gouvernements à expliquer les objectifs de leurs engagements militaires auprès d’opinions publiques de plus en plus sceptiques.

Cet appauvrissement de la réflexion stratégique des deux côtés de l’Atlantique est en partie attribuable aux deux décennies de la « guerre globale contre le terrorisme » dans laquelle l’Amérique a plongé le monde au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, entravant toute forme de réflexion sérieuse sur les évolutions de l’environnement stratégique contemporain. La lutte contre le terrorisme a empêtré les Etats-Unis et leurs alliés dans des guerres perpétuelles, et diminué la créativité diplomatique ainsi que leur capacité à réagir aux changements géopolitiques.


Alexandra de Hoop Scheffer est politiste et directrice, à Paris, du think tank transatlantique German Marshall Fund of the United States.

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Quel est l'impact de la parole des présidents américains sur l'image et l'influence de leur pays ?


L'ultimatum de George W. Bush à Saddam Hussein avant d'envahir l'Irak en 2003 | INA
Il y a 20 ans était déclenchée la guerre en Irak baptisée par les États-Unis «Liberté de l'Irak». Trois semaines vont suffire pour sceller le sort du régime de Saddam Hussein et prendre le contrôle de Bagdad.
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